Président du Conseil de Prud’hommes de Fréjus, Alain Dogliani est engagé depuis 1990 dans cette juridiction paritaire composée de juges non professionnels représentant les employeurs et les salariés, instituée en 1806.
« Faites justice aux autres, afin qu’on vous la fasse à vous-mêmes »… La genèse de l’engagement aux Prud’hommes d’Alain Dogliani, en 1990, n’est pas très éloignée de ce proverbe oriental. A l’époque à la tête de l’entreprise Thalgo, à Roquebrune-sur-Argens, il est mécontent d’une décision en sa défaveur du Conseil de Prud’hommes de Nîmes. Sa critique du jugement lui donne envie de se présenter et de veiller à ce que cela ne se produise pas pour d’autres, tout du moins dans sa juridiction, en l’occurrence Fréjus.
Après échange avec le président de l’Union Patronale du Var de l’époque, Jean-Claude Bonnet, par l’intermédiaire de Bernard Lecat, alors vice-président en charge de la délégation de Fréjus et de l’Est-Var, il siège en tant que conseiller prud’homal en section commerce qu’il préside dans les deux/trois années suivantes. Dans un délai à peu près équivalent, il devient, en alternance annuelle selon le principe de cette juridiction paritaire, président ou vice-président du Conseil de Prud’hommes de Fréjus.
« J’ai pu faire ma justice, sinon je ne serai pas resté aussi longtemps », affirme cet entrepreneur qui fait référence pour son sens de l’équité et sa probité, aux Prud’hommes comme dans l’ensemble de son parcours dans la vie publique varoise et régionale. « Cet engagement repose sur la volonté d’être utile et l’envie de s’impliquer pour le bien commun. Il est important que les chefs d’entreprise s’investissent et passent du temps dans la justice prud’homale. C’est du quasi-bénévolat au regard des faibles indemnités et cela s’ajoute à leur activité professionnelle, contrairement aux salariés qui siègent durant leur temps de travail, mais c’est essentiel pour le bon fonctionnement du paritarisme au sein des Prud’hommes. Cela permet d’avoir une meilleure connaissance du sujet, de découvrir les syndicats, qui sont très investis, et le fonctionnement du dialogue social. A titre personnel, cela m’a été très utile et enrichissant. Il faut savoir aussi que nos jugements prud’homaux, à part ceux évidents, font l’objet de vrais débats, de luttes même parfois ».
Renforcement de l’amiable
Parmi les idées reçues sur lesquelles Alain Dogliani s’inscrit en faux, la prétendue condamnation systématique des employeurs. Sachant que 99% des saisines sont effectuées par les salariés, la majorité des jugements penche logiquement en leur faveur, mais dans une proportion de 60/40 qui lui fait dire que « 40% des employeurs ont raison, avec des décisions le plus souvent confirmées en appel ».
S’agissant de l’évolution des Prud’hommes, outre les dernières réformes fonctionnelles et l’ouverture à davantage de conseillers, l’introduction par les pouvoirs publics de l’incitation à la médiation afin de désengorger l’ensemble des tribunaux touche bien évidemment la justice du travail, d’autant que le principe de conciliation est ici au commencement de toute saisine. « Cela intervient en effet dès le début d’une procédure mais force est de constater que c’est trop tôt après le clash. Il y trop d’émotion et, marqués psychologiquement par ce divorce social, les gens ne sont pas prêts à un accord amiable. En revanche, un ou deux ans après, il nous arrive plus souvent de prendre acte d’accords entre les parties sur des bases très proches de nos discussions initiales, l’affect en moins. On tend de plus en plus vers cela et les avocats montent en puissance aussi sur ce champ, ce qui est une bonne nouvelle ». Les enjeux sont importants dans la mesure où la Cour d’appel conditionne ses temps d’instruction aux passages préalables par les modes alternatifs de règlement des différends (Mard) lorsque cela est possible.
Formation de rigueur
Le meilleur moyen de les raccourcir est bien entendu, lorsque les tentatives en bureau de conciliation puis en médiation ont échoué, de rendre des décisions équilibrées et satisfaisantes. « Nos jugements sont de plus en plus motivés et se rapprochent de ce que pourraient penser les juges de Cour d’appel », plaide Alain Dogliani. « Nous avons pour ce faire des formations très précieuses, comme celles dispensées par l’Ecole Nationale de la Magistrature, par les professeurs de droit de l’Université de Toulon et par l’EDS de l’UPV (NDLR : association nationale Entreprises et Droit Social, émanation du Medef) au titre de la formation continue ». Ces dernières sont effectuées avec compétence par Nathalie Chauvin, directrice juridique de l’Union Patronale du Var et formatrice EDS pour le Var.
« Un bon conseiller de prud’hommes est un conseiller qui se forme régulièrement, assidument, c’est-à-dire à 100% et non à 30 ou 40%. C’est par ce comportement respectueux de son engagement qu’il pourra tenir tête à un conseiller salarié dans l’hypothèse où celui-ci agirait en dépit du code du travail ». Alain Dogliani a pu largement vérifier au fil du temps que tout se niche dans les détails, d’où l’utilité des nuances et du niveau de maîtrise de la matière que l’on traite, qui est en outre très mouvante. « Il faut être costaud et droit dans ses bottes sur la base de savoirs précis », au nom d’une justice bien ordonnée et pour que tout le monde prenne sa part de responsabilité !
Si le mandat vous intéresse, merci de contacter l’UPV